lundi 22 octobre 2012

La Direction centrale du Renseignement intérieur


L'acte de naissance de la DCRI repose dans la volonté politique de faire fusionner la Direction de la surveillance du territoire  (DST) avec les Renseignements généraux (RG). Il s'agit certainement d'abord d'une décision politique qui vise à permettre la création d'une centrale d'intelligence permettant de multiplier les renseignements principalement sur le terrain de la lutte antiterroriste. La DST souffrait certainement de son isolement et en même temps se plaçait comme une centrale de renseignement avec des prérogatives qui pouvaient échapper au contrôle politique ou parlementaire (à l'instar des centrales américaines de renseignement). Le gain est aussi dans la minoration du rôle des RG dans le paysage de la délinquance. Les RG étaient le pouls du pays, des régions, des villes, des quartiers. Leur rôle auprès des préfectures et des préfets étaient de première importance, au point que lors de cette fusion les préfets se soient émus de la perte de cette voix de guidage dans la construction d'une politique de sécurité.On se souvient que lors des émeutes de 2005 la seule ville relativement épargnée fut Marseille qui disposait de renseignements précis permettant d'intervenir en amont de l'émeute : le rassemblement prévu sur le parking d'un supermarché par des jeunes fut contrôlé par des forces importantes de police, ce déploiement permis de procéder à plusieurs interpellations pour des délits mineurs. L'émeute fut ainsi évitée. Les RG depuis longtemps troublent l'espace politique par la création de tableaux qui permettent une lecture pointue de la délinquance, ce qui bien sûr engendre un malaise face à des chiffres qui prennent une forme exponentielle.


Les RG étaient nés en 1907, la DST en 1944, leur fusion sous le sigle DCRI date du 1er juillet 2008. Nous sommes dans la ligne de la sécurité globale et du livre blanc sur la défense : il faut coordonner la lutte des polices pour lutter plus efficacement contre toutes les atteintes aux intérêts de la nation. Les RG visaient une connaissance étendue des territoires et engageaient leur action du côté de la connaissance des populations, le terme de "généraux" signifiant la diversité des tâches et des donneurs d'ordres possibles. Désormais les missions sont plus liées à la lutte antiterroriste : "prévenir et réprimer, sur le territoire de la République, les activités inspirées, engagées ou soutenues par des puissances ou des organisations étrangères et de nature à menacer la sécurité du pays.  L'objectif de la DCRI est de déceler et de neutraliser toute menace résultant des activités de services de renseignement de pays adverses, d'organisations ou d'agents se livrant à l'espionnage, au sabotage ou à la subversion". La position de la DCRI est donc celle d'une centrale de renseignement au sens du contre-espionnage, tant sur le plan de la prévention des actes terroristes que sur le sol de la guerre économiques et industrielles. La conservation d'un volet de lutte contre les atteintes à la sureté de l’État permet de conserver l'expertise des RG. La concurrence possible entre ces anciens services se trouve annulée par la fusion qui donne un nouvel élan à la lutte antiterroriste. La prise en charge de la cybercriminalité (qui comprend la surveillance des réseaux sociaux et de l'usage d'internet) est désormais une des missions de la DCRI.


 L'attaque contre la DCRI posée aujourd'hui par différents journaux à propos du terroriste Merah ne tient pas compte d’éléments de terrain. Merah semblait un candidat possible pour les services de renseignements car tout dans son système de vie semblait démentir l'engagement salafiste. La volonté de le recruter était donc légitime, l'immaturité qu'il affichait dans ses mises en scènes en même temps que son attachement à la consommation permettaient d'envisager une approche, à un moment précisément où il n'était pas possible de l'interpeller puisque la loi ne pouvait pas faire un délit de la participation supposée à un camp d'entraînement à l'étranger. Merrat était un "tafkir", ceux qui passent du côté de l'islam radical tout en cachant leurs plans terroristes et en semblant adhérer au moins en partie au mode de vie occidental. Il est alors extrêmement difficile de trouver des éléments solides pour intervenir en amont. Certes l'attitude de Merah est suspecte, des liens avec des fondamentalistes, des habitudes de clandestinité dans ses communications et sa présence dans des zones à risques terroristes auraient justifiés son interpellation, mais l'absence de preuve pour les tribunaux était le gage d'une libération immédiate. La question du terrorisme pose bien sûr d'une façon criante la place de la prévention et des méthodes utilisables en une démocratie. Ceux qui accusent aujourd'hui la DCRI de "légèreté" auraient criés les premiers au déni de liberté si à l'instar des États-Unis nous extrayions les terroristes supposés pour les neutraliser.

La seule solution étant dans la multiplication du personnel policier pour obtenir des résultats notables et permettre de suivre au moins en partie tous les jihadistes supposés. Le renforcement de la loi antiterroriste permettra d'agir si simultanément des moyens et une liberté plus grande sont donnés aux services secrets.









Aucun commentaire: